Leur relation se dégrade depuis des mois mais aucun d’eux n’a le courage d’agir. Il se réfugie dans les mots, elle dans le silence. Des mots de plus en plus chargés d’agressivité, de colère mal contenue, un silence de plus en plus lourd, trahi par un regard plein de défiance.

Un jour, la haine prend le dessus sur la souffrance et c’est le geste de trop. Celui qui tue et libère en même temps. Celui qui justifie la séparation.

Laisser hurler sa douleur pour délivrer son corps

Alma se sent décomposée. Elle dit flotter dans une sorte d’errance mentale et de profonde lassitude physique. « J’ai perdu la maîtrise de ma vie. Mon corps tressaute en permanence de l’intérieur. Je sursaute au moindre bruit et mon cerveau refuse toute réflexion trop longue. La moindre sollicitation me fait fondre en larmes ».

Femme active et battante, Alma a toujours eu comme règle de garder le contrôle. Elle est aujourd’hui effrayée par la sensation de grande fragilité qui la submerge.

Un déséquilibre soudain et un vertige furtif la contraignent à arrêter de penser, pour respirer et se détendre. Son corps exprime une douleur aussi intense que la souffrance morale qu’elle s’est infligée durant des mois.

Alma veut arrêter de tomber dans ce gouffre sans fond. Elle veut ressentir l’unité de son corps. Elle veut penser sans décrocher et se mettre à pleurer. Elle veut Vivre.

Elle va oublier son obstination du contrôle et accepter sa fragilité du moment. Elle va lâcher-prise en consentant à accueillir et à vivre toutes ses émotions. Son corps va tirer profit des pérégrinations de son mental pour « se refaire une santé ».

Perdre le contrôle de son mental est salvateur.

Le corps se libère des tensions émotionnelles emmagasinées, entraînant dans son sillage une foule d’images et de sensations enfouies, trop heureuses de revenir à notre conscience. Ce sont elles qui vont nous aider à comprendre « pourquoi ? ».

La douleur a de Bien qu’elle offre l’occasion d’une mort symbolique à un état d’insatisfaction. Elle permet d’accueillir une renaissance à de nouveaux choix de vie.

Apaisée, la douleur donne à recouvrer notre Vérité intérieure

Retrouver la maîtrise de sa vie exige de vivre pleinement ces journées où la prégnance des pensées décousues apportent toutes les informations nécessaires à l’expression de la vérité émotionnelle. Comprendre ce qui nous est arrivé, c’est reprendre la route en sens inverse pour revivre le moment où nous nous sommes perdus. Le moment où nous avons quitté le « chemin de Notre Vie ».

Profitant de son mental moins apte à la censure et au contrôle ; Alma lâche prise et revit son histoire. Chaque image, conscientisée, est à reconnaître et à accepter. Chaque émotion lui dévoile la vraie motivation de ses choix. De ces moments importants où la priorité donnée à un besoin impérieux occulte notre « destinée ».

Sur-aimée de son père, rivale involontaire de sa mère, aînée autoritaire responsable d’une grande fratrie, chef de bande respectée dans son quartier ; Alma se ressent asexuée. Femme invisible elle est la « pote » des mecs qui lui plaisent ; les autres la fuient, seuls les « crétins » ou les « tarés » semblent s’intéresser à elle. De mal-amour en mes-amour ou non amour, elle se convainc de son impossibilité à être aimée comme les autres filles. Incapable de définir le pourquoi ? en trop ou pas assez ; Elle renonce à être aimée à sa juste valeur.

Un jour, enfin, elle rencontre l’Amour. Un Amour à donner et à recevoir. Elle en oublie ce à quoi elle aspire. Elle relègue ce qui la motive et trouve sens dans sa vie. Elle quitte son « chemin de Vie ». Elle abandonne ses rêves. Le tout sans y réfléchir parce que Aimer est Sa priorité.

Assoiffée, elle se noie à vivre cet amour. De peur de le perdre, elle l’enferme à l’abri du monde. Ivre de bonheur, elle en exige toujours plus.

Lui s’entête à lui expliquer qu’il ne peut, à lui seul, combler tous ces manques affectifs. Il ne peut répondre à son besoin intarissable d’expression de son attachement. Il ne peut réparer le mal qui lui a était fait.

Il lui offre l’Amour au Présent pour construire un Futur solide.

Il essaie de se faire entendre. Il s’épuise à lui faire comprendre. Un jour il la regarde en pensant « j’arrête, vouloir t’en donner plus, toujours plus, c’est mourir ».

Pour survivre, il renonce à l’aimer.  L’amour reste présent dans son cœur, mais son expression du moment s’éteint. La séparation est inévitable.

 

« Faire du reste de sa vie le meilleur de sa vie »

Prisonniers l’un de l’autre, ils ont dû se libérer. Ce qu’ils ont vécu n’est pas Aimer. L’amour ne doit pas être une prison mais un espace de complémentarité où se vit et s’exprime la liberté de chacun.

On ne rejoue pas son histoire. On doit la comprendre, en tirer des enseignements. On doit reconnaître ces manques qui nous créent des zones de faiblesses. On doit les accepter sans chercher à compenser et là on est armé pour apprécier ce que la vie nous apporte.

Alma se sent perdue corps et âme. Elle veut reprendre le cours de sa vie. Elle va prendre le temps. Le temps de la paix et du silence pour se reconnecter à son Moi intérieur. Elle sait qu’elle peut aimer et être aimée à sa juste valeur.

« Faire du reste de sa vie le meilleur de sa vie ». Chaque mot, lentement prononcé, semble se souder au suivant comme si Alma cherchait à les conscientiser.

« Vous croyez ? » me dit-elle. Une lueur s’allume dans son regard quand je lui réponds

« c’est un défi comme un autre, le tout est de vouloir le relever ». 

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